mardi 13 mars 2018

LADY MECHANIKA VOL 1, 2, 3 et 4 de Joe Benitez


4ème de couverture :
Tome 1 : Le mystère du corps mécanique
"Elle est l'unique survivante d'une terrible expérience qui l'a laissée avec deux bras mécaniques. N'ayant aucun souvenir de sa captivité ou de son existence passée, elle s'est construit une nouvelle vie d'aventurière et de détective privée. Elle use de ses capacités uniques pour agir là où les autorités en sont incapables. Mais la quête de son passé perdu ne s'arrête jamais. Les journaux l'ont appelée : Lady Mechanika !
Tome 2 : Révélations
"Suite du premier volume : Une véritable quête d'identité dans une Angleterre victorienne revisitée et très steampunk, où la magie et la superstition se confrontent aux découvertes scientifiques. Découvrez la fin de ce premier arc en deux tomes !" 
Tome 3 : La tablette des destinées
"Lady Mechanika reçoit la visite d une amie d enfance qui a une mission pour elle : retrouver les Tablettes de la Destinée, un artefact sumérien censé détenir le savoir des dieux et les secrets de l univers... rien que ça ! Il n en faut pas moins pour éveiller la curiosité et le goût de l aventure de notre belle héroïne, qui va sans plus tarder partir dans une quête survoltée aux quatre coins du monde à la recherche de cette précieuse et mystérieuse relique..."
Tome 4 : Les garçons perdus de West Abbey suivi de La Dama de la Muerte
"Dans Les Garçons perdus de West Abbey, Lady Mechanika enquête sur la mort d'enfants «indésirables» à Mechanika City. Une affaire qui lui provoque de douloureuses visions. S'agit-il de souvenirs qui refont surface après tant d'années, ou de simples cauchemars ?
Dans La Dama de la Muerte, Lady Mechanika part en voyage dans un petit village au Mexique au moment de la fête des morts. Mais les festivités deviennent littéralement mortelles lorsque survient un mythique démons des cavaliers de l'Apocalypse !"


Alors, doc, verdict ?
 Joe Benitez, c'est l'illustrateur typique que l'on croise sur des projets initiés par d'autres. Si son coup de crayon n'est pas forcément reconnaissable au sein de talents plus évidents de la maison Top Cow (Silvestri - mÔsieur Darkness, Turner - mÔsieur Witchblade), il a l'avantage de ne pas avoir foutu en l'air l'esprit des comics auxquels il a participé, faisant de lui un bon artisan (les Magdalena en sont un excellent exemple).

Avec ce Lady Mechanika, le voici auteur-propriétaire (il garde le contrôle sur sa création et peut la faire illustrer par d'autres dessinateurs), à la tête d'une BD originale, une œuvre visuellement très riche, dont l'histoire part encore un peu dans tous les sens.

Le scénario promet beaucoup, mais distille très peu de réponses sur les origines de l'énigmatique Lady M. Ceci étant, il se sert de multiples références culturelles et mythologiques pour plonger notre héroïne dans des enquêtes teintées d'aventures et de mysticisme.
En privilégiant le rythme, il aurait tendance à atténuer l'impact dramatique de certaines scènes. Le récit mise beaucoup plus sur l'action que sur la psychologie, ce qui rend certains personnages moins consistants.

On sent chez Lady Mechanika l'influence de Tomb Raider, notamment à travers un physique sexuellement offensif, sans qu'il ne soit jamais question de la réduire au seul rang d'objet sexuel (tant mieux, ras-le-bol de réduire une héroïne à son potentiel amoureux), et étrangement, elle partage la même fascination qu'exerce Angelina Jolie sur le public.
Malgré une enfance terrifiante, Lady M. reste toujours dans le contrôle, très préoccupée par le sort des "petites gens" et assoiffée de justice. Loin d'être aussi indestructible qu'on le croit, la vulnérabilité qu'elle tente de masquer sous ses manières d'amazone la rend plus humaine. Et en marge des enquêtes qu'elles mène, on la suit avec attention dans sa quête sur son passé.

Bref, si j'ai apprécié le personnage principal, je suis plus mitigée sur le traitement infligé aux personnages masculins ; l’acolyte Lewis, caution humoristique type "Géo Trouvetou" est très superficiel, l'intrigant policier Singh apparaissant dans les Garçons perdus m'a paru fade malgré un physique de beau ténébreux. Le seul qui m'ait touchée gît six pieds sous terre, soit le mystérieux Dallas. À côté de personnages masculins peu charismatiques (grosse originalité pour un comic), deux petites filles viennent appuyer la touche résolument féministe de cette BD. L'une est fascinée par la puissance de Lady M. au point de calquer son comportement et son indépendance, la deuxième est un petit génie adepte d'archéologie et de langues mortes.

J'ai aimé l'élégance des dialogues, moins leur surabondance, qui noie parfois les vignettes. On est parfois dans le contraire du "show don't tell", mais dans un sens, ça oblige à s'attarder sur cette BD. Ça change des comics engloutis en 1/2 heure...
Après une introduction prometteuse, mêlant chasse au démon et présentation explosive de l'héroïne, il ne sera plus question de créature vraiment surnaturelle dans les quatre premiers volumes. Dommage, le mélange démoniaque/steampunk, avait un goût d'inédit super intriguant.


Les décors sont somptueux, détaillés, les costumes, inspirés des cosplayeuses croisées en convention, sont très recherchés. Pour créer son univers autour des personnages, Benitez, qui  s'est entouré d'une équipe de qualité (Martin Montiel pour les décors et dessinateur en second, Peter Steigerwald à la couleur), a su utiliser le meilleur de chacun pour en tirer une œuvre très aboutie.

Un autre aspect passionnant, c'est l'univers dans lequel Joe Benitez fait évoluer son héroïne. Récit steampunk définitivement assumé, il n'hésite pas mettre à contribution superstitions, alchimie et magie pour enrichir ses histoires. Cela donne des histoires et des illustrations variées, ainsi que le sentiment de se renouveler en permanence. De l'Angleterre victorienne au Mexique en passant par l'Afrique, les aventures de Lady M. s'imposent comme un mélange d'enquêtes à la Sherlock Holmes et d'action à la Indiana Jones (ou Lara Croft !).
Par ailleurs, la nature sombre et souvent violente de son univers n'est jamais adoucie, ce qui donne parfois des scènes dures et cruelles au ton adulte.

Glenat a apporté un grand soin à son édition en VF. Les tomes sont luxueux, et proposent parfois des couvertures alternatives. L'éditeur a intégré des esquisses et des interviews entre les épisodes, un peu comme des entractes, permettant de faire une pause tout en creusant un peu plus le travail des auteurs.
En fin d'ouvrage, on retrouve ce qui fait souvent l'esprit des comics, soit des planches type art-book, dessinées par l'auteur et ses collègues. Il s'agit d'une pratique très répandue aux USA, où les auteurs se côtoient souvent sur des collaborations, et apprécient de livrer leur propre vision d'un personnage emblématique (surtout quand il s'agit d'une belle héroïne).

Verdict : une BD flamboyante, sombre et originale, qui évolue sans cesse et mérite d'être découverte !

GLÉNAT
tome 1 : 112 pages
tome 2 : 112 pages
tome 3 : 160 pages
tome 4 : 160 pages

samedi 3 mars 2018

LA CONFRÉRIE DE LA DAGUE NOIRE 10 : L'AMANT RESSUSCITÉ de J.R. Ward


4ème de couverture :
"Depuis la mort de sa shellane, Tohrment est dévasté. Alors que la Confrérie fait face à un nouveau clan de vampires dont le dessein est de s’emparer du trône du Roi aveugle, un ange déchu aux intentions mystérieuses ramène Tohr auprès des frères. Mais celui-ci souhaite ardemment se venger. Lorsque sa bien-aimée lui apparaît en rêve – piégée dans un enfer glacé – , il se tourne vers l’ange en espérant la sauver. Or, quand ce dernier lui explique qu’il doit apprendre à en aimer une autre pour libérer son ancienne compagne, Tohr comprend qu’ils sont tous condamnés..."

Alors, doc, verdict ?
En toute honnêteté, Tohr est le frère le moins passionnant de la Confrérie. Installé en couple pépère dans les trois premiers tomes, rigide et autoritaire, il va perdre son épouse (sa shellane en langage vampire) dans un contexte violent totalement inattendu. Malgré cela, le personnage n'est jamais parvenu à m'émouvoir.
Et c'est de nouveau ce qui m'a manqué dans ce volet qui lui est consacré.
Cet homme détruit par une perte inestimable ne provoque pas d'empathie. Le paradoxe, c'est d'être en mesure de comprendre ses réactions pour en avoir ressenti de similaires, sans avoir envie de compatir.

PersOnne, la mère de Xhex ressuscitée d'entre les morts, présente un personnage plus intéressant, même si sa personnalité effacée la rend moins consistante. Blessée dans sa chair et son âme par les viols répétés d'un sympathe (une branche vampirique douée du don de manipuler les émotions, dont certaines particularités physiques peuvent la rapprocher du scorpion), elle s'est réfugiée dans l'oubli et la servitude, s'estimant indigne du rang de la noblesse dont elle est issue (la Glymera).

En plus de suivre la reconstruction de ces deux êtres malmenés par l'existence, et la relation qui va forcément se nouer entre eux, leur accordant amour et rédemption, on retrouve le couple de Xhex et John en difficulté. Le parallèle entre ces deux couples est d'autant plus évident que l'une est la fille de PersOnne et le second le fils adoptif de Tohr. John souffre de voir sa shellane en danger, et ce qui les avait rapproché (sa fascination pour la guerrière) est en train de détruire leur couple.

On croise évidemment Vhif et Blay, qui constituera le prochain couple vedette, le premier, particulièrement mis en avant dans cet épisode, ayant accompli un coup d'éclat digne de le faire entrer dans la Confrérie.
Quant à Lassiter, nouvelle caution humoristique, je l'ai trouvé assez fade.
 
J.R. Ward continue ainsi d'introduire de multiples intrigues amoureuses à ses récits, construisant peu à peu la trame des tomes à venir. C'est ainsi qu'on assiste à la rencontre entre le plus grand détracteur du roi Kolher, le sauvage Xcor et sa future compagne, l'Élue Layla. Il y a beaucoup de scènes de sexe, qui m'ont parfois semblé superflues, bien que cette romance soit justement construite sur l'attirance physique. On a l'impression que Tohr substitue une obsession (pour son épouse défunte) par une autre (le besoin de jouir).

J'ai donc logiquement plus apprécié les intrigues annexes que la romance principale, malgré la cohérence avec laquelle elle est menée. Le complot de la glymera est encore au stade embryonnaire, nul doute qu'il prenne beaucoup plus d'importance dans les suivants.

D'un point de vue technique, la traduction des dialogues est bien mieux. Fini le zapping des négations ex : "je veux pas dire" qui faisait passer les personnages pour des abrutis immatures.

Verdict : une lecture agréable sans être bouleversante

MILADY
832 pages